Cadres à Airbus : point sur les conditions de travail

Rédigé le 19/09/2023

A Airbus, comme ailleurs en France, les conditions de travail des ingénieurs, cadres et techniciens (ICT) se dégradent : perte d’autonomie, de reconnaissance et de sens de leur travail, notamment vis-à-vis des enjeux environnementaux. Cette dégradation est aussi liée à l’absurdité de leur organisation, à la numérisation massive (télétravail, process Agile, smartphones, etc) et à leur déclassement en cours. Nous analysons dans ce tract les principales remontées collectées par les adhérents CGT auprès de leurs collègues. 

N’hésitez pas à nous contacter, vous aussi, pour nous faire part de votre vécu à Airbus Avions.

Télécharger la version imprimable du tract (PDF)

Temps de travail

RELOAD

L’accord impose une augmentation du temps de travail : si le salarié refuse, c’est le licenciement ! Le salaire des ICT déjà présents dans l’entreprise seront compensés (+1,4%), mais pas celui des nouveaux arrivants à partir de 2024.

Cet accord est en décalage avec les attentes des ICT et les besoins sociétaux qui, au contraire, appellent à une baisse du temps de travail pour s’accomplir en dehors de l’entreprise, avec un meilleur partage vie pro / vie perso. Rappelons que la CGT revendique la réduction de la semaine de travail à 32h (sans perte de salaire).  

Quelques repères

Être cadre (soit près de 20% des salariés en France) ne veut pas dire nécessairement être au forfait jour. Et pour les presque 50% de cadres qui y sont, la loi impose des obligations aux employeurs : assurer un décompte de la durée du travail en jours et assurer un suivi de la charge de travail (en particulier sa répartition dans le temps). La CGT revendique un décompte en temps de travail réel. Rappelons que le forfait jour en France a été jugé à quatre reprises contraire au droit européen. 

Et les heures supplémentaires ?

Sous prétexte de flexibilité et d’autonomie (appréciées des salariés), le forfait jour permet à l’entreprise d’étendre la durée de travail des ICT avec le risque de devoir être disponible à toute heure, jusqu’à devenir “corvéable à merci”. 

Grâce au flou et aux possibilités que permet ce forfait, la forte charge de travail et les outils numériques conduisent beaucoup d’ICT à travailler allègrement plus que les 40,5 heures théoriques par semaine prévues à Airbus Avions.

Par ailleurs, ils se disent livrés à eux même, sans stratégie claire de la part de leur manager, pour prendre des décisions. Enfin, ils disent devoir gérer des tâches additionnelles non reconnues en plus de leur activité principale (suivi de budget, tutorat, buddy, formation de nouveaux collègues, etc ).

Un télétravail qui reste limité à Airbus

Malgré les avantages qu’il apporte tant pour le salarié que pour l’entreprise, la direction reste frileuse sur le télétravail en imposant une présence sur site au moins trois jours par semaine. Ce qui témoigne d’une croyance très ancrée dans le présentéisme. Il y a certes des inconvénients au télétravail : intensification du travail, perte de repères horaires amplifiés par les outils numériques, absence d’indemnisation des frais engagés à domicile (installation du bureau, chauffage, électricité, internet, tickets restaurant, etc).

Dans les négociations RELOAD qui s’ouvriront en 2024 sur ce thème, la CGT entend porter des revendications pour améliorer les conditions de télétravail, tout en laissant le choix de ne pas télétravailler et en défendant le droit à la déconnexion.

Plan social, qualifications et cartographie des connaissances

De nombreux collègues ICT témoignent de souffrances causées par une surcharge chronique liée aux départs (PSE* COVID de 2020 appelé Odyssey). De plus, ils se sentent déstabilisés par la classification sous-cotée de leur poste (car basée sur leur salaire et non le travail réel comme le prévoit la convention collective et RELOAD). Cette classification est révisable dès la moindre réorganisation, et elle n’est plus garantie par des diplômes, par une expérience et par des savoir-faire qui ne sont désormais plus reconnus ni valorisés au cours de la carrière.

Quid des qualifications et/ou certifications acquises, (exemples : PM*, CM*), par les chefs de projets, ou par les experts Airbus ? RELOAD prône clairement la mobilité à tout prix pour qui veut progresser dans sa carrière, avec dès lors une exacerbation de la compétition entre collègues. L’UIMM* (syndicat patronal de la branche métallurgie) ne s’y est pas trompée : la nouvelle convention collective a comme principal objectif de baisser la rémunération des ingénieurs et cadres ! 

Mais il y a un hic pour la direction : consciente du problème de perte de connaissances dans Airbus sous l’effet combiné du PSE et des nouvelles classifications, la direction a lancé un grand chantier d’inventaire des connaissances critiques (nommé “Critical Knowledge Mapping”) dans l’entreprise . Cherchez l’erreur !

Vers une baisse de la productivité ?

Devant des injonctions de plus en en plus fortes de la part du management (coûts, délais, etc), devant la multiplication des tâches administratives (culture du reporting, suivi de budget, de sous-traitance, micro-projets, etc), devant une individualisation des responsabilités et devant une non-reconnaissance de leur travail (atteinte des objectifs, sous-classification du poste), les cadres perdent le sens et la motivation dans leur travail et se désengagent. De l’aveu des collègues cadres eux-mêmes, cette recherche de la performance à tout prix nous conduit vers une baisse de la productivité, de la qualité et de l’innovation.

Salaires : le compte n’y est pas !

Côté pouvoir d’achat, les cadres constatent le décrochage de leur rémunération vis-à-vis de l’inflation. De plus, les collègues déjà présents dans l’entreprise constatent qu’ils sont moins bien payés et moins bien classés que les nouveaux embauchés, parfois moins expérimentés !

Au total, les cadres considèrent dans leur grande majorité que le compte n’y est pas en regard des bénéfices engrangés par le groupe depuis le COVID (plus de 33 000 € net de bénéfices par salarié en 2022). Alors qu’une part croissante de ces mêmes bénéfices est allouée aux actionnaires (+20% entre 2021 et 2022)…

Environnement

L’écologie et l’environnement sont des sujets qui préoccupent un nombre croissant d’entre nous. Et nous voyons une incohérence entre les réductions d’émissions de GES* obtenues grâce aux améliorations de la technologie de nos avions  et les perspectives de croissance du trafic aérien (+3% par an soit un doublement tous les 15 ans).

Airbus doit rester un leader et un exemple pour toute la filière dans la lutte contre les émissions GES* (CO2, NOx, contrails, etc) via ses orientations stratégiques, ses produits, son organisation industrielle et son éthique.

Pour pousser l’entreprise à prendre toutes ses responsabilités sociales et environnementales, la CGT Airbus a créé une commission environnement pour construire et porter nos revendications dans des conditions de débat apaisé, ouvert et constructif.  

Les gestes individuels et les solutions technologiques sont nécessaires mais ne suffiront pas. Il est temps de s’appuyer sur nos savoir-faire et notre collectif syndical pour être force de proposition et de pression.

Contactez la CGT pour, vous aussi, nous faire part de votre vécu en tant qu’ICT.

Pour que ça change, en novembre, je vote CGT !

Glossaire
UIMM : Union des Industries et des Métiers de la Métallurgie
PSE : Plan Social et Economique
CM : Certification Manager
GES : Gaz à Effet de Serre
NOx : Oxydes d’Azote
PM : Project Manager

Télécharger la version imprimable du tract (PDF)